Allemagne, nous voilà!
BARRAGES COUPE DU MONDE 2006 Au terme d'un match complètement fou, le visiteur a décroché son billet pour le Mondial. Des bagarres ont éclaté lors du retour aux vestiaires. Grichting, Vogel, Huggel et Burgener ont essuyé des coups
NICOLAS JACQUIER
17 novembre 2005
L'image est saisissante, qui fera le tour du monde: celle de joueurs suisses qualifiés pour la Coupe du monde mais s'enfuyant à toutes jambes dès le coup de sifflet final pour tenter de rejoindre leurs vestiaires afin d'échapper à la meute des... joueurs turcs lancés à leur poursuite sur ordre de Fatih Terim. Mauvais perdant, le sélectionneur a(urait) demandé à ses protégés de «casser du Suisse», de faire notamment sa fête à Vogel, appelé à revenir ici même mardi prochain avec le Milan AC pour le compte de la Ligue des champions. Des altercations allaient du reste se produire, et des incidents éclater lors du retour aux vestiaires, alors que les supporters helvétiques étaient encadrés par la police. Agressés par leurs homologues turcs, Grichting - le visage en sang, le défenseur a dû être évacué à l'hôpital -, Vogel, Huggel et Eric Burgener ont été touchés dans la bataille d'Istanbul. A la mi-temps déjà, Degen avait été bousculé par Sükür. Le fair-play demeure une vertu peu cultivée aux bords du Bosphore. Qu'importe les circonstances, parfois dramatiques, l'essentiel a été atteint par la Suisse, qualifiée grâce aux buts marqués à l'extérieur.
Alors même que la Turquie, que l'on pensait définitivement éliminée, avait repris espoir à la 89e minute lorsque Tuncay (trois buts hier soir) profitait d'une nouvelle hésitation de Zuberbühler, la Suisse allait vivre les quatre minutes d'arrêts de jeu les plus longues de son histoire; jusqu'à l'ultime coup de sifflet de M. De Bleeckere, l'expédiant officiellement en Allemagne. Mais que ce fut dur avant cette explosion de joie! Une fois, deux fois, trois fois, Vogel et Cie faillirent tout perdre. Leur mérite fut de reprendre leurs esprits en deuxième période, après le 3-1 turc obtenu sur penalty.
Le visiteur avait pourtant connu un départ idéal, en obtenant un penalty express après... 24 secondes de jeu seulement. En guise de l'enfer annoncé, c'était plutôt le paradis. Menant alors 3-0 à l'addition des deux matches, la Suisse s'était-elle à ce moment-là crue trop vite qualifiée? Le ciel allait lui tomber sur la tête quand Tuncay, chaque fois de la tête, relançait les actions turques en exploitant la fébrilité de Zuberbühler. Deux buts qui provoquaient le réveil d'un public chauffé à blanc. Paradoxalement, la Suisse allait connaître sa meilleure période au moment de se retrouver au bord du vide. La rocade opérée entre Barnetta et Wicky permit d'équilibrer l'équipe. Comme Gygax avant lui (occasion de... 0-2 juste avant le premier but turc), Frei se procura une, puis deux occasions de but. Qu'il manqua, aïe! Echappant à toute logique, le scénario aurait pu être catastrophique pour la Suisse. Mais il allait être celui du bonheur. La Suisse ira en Allemagne, et au vu de ce qu'elle a montré dans son groupe de qualification - et encore hier soir, ce n'est que justice. Sur le coup de 22?h?45, dans un stade vide annexé seulement par 600 supporters, Köbi Kuhn fit enfin son apparition. La fête pouvait commencer. Encadrée par la police et l'armée turques....
Turquie - Suisse 4-2
Sükrü-Saracoglu. 50 000 spectateurs environ. Arbitre: M. De Bleeckere (Bel).
Buts.
2e Frei (penalty) 0-1. Suite à un lob de Frei, l'arbitre sanctionne une main baladeuse d'Alpay, offrant à la Suisse son premier penalty depuis 1183 jours (août 2002). Le pied d'Alex (23e but en 42 sélections) ne tremble pas.
24e Tuncay 1-1. Sur un long centre à suivre venu de la droite, l'attaquant de Fenerbahce relance les actions turques de la tête.
38e Tuncay 2-1. Sur un nouveau ballon venu de la droite, le buteur local remet ça, accompagnant de la tête une reprise de Sükür. Un but qui porte aussi la responsabilité de Zuberbühler, resté figé sur sa ligne.
51e Necati (penalty) 3-1. Streller accroche Serhat pour un penalty que certains n'hésiteront pas à qualifier de généreux. Pour la Suisse, toujours qualifiée, il reste alors 39 longues minutes à tenir...
84e Streller 3-2. Lancé par Frei, le grand Marco s'en va seul affronter Volkan, et le dribbler pour signer dans un angle fermé un but de la libération (provisoire) qui va provoquer la colère du public turc.
89e Tuncay 4-2. Sur un énième centre, Zuberbühler ne sort toujours pas. Sükür en profite pour trouver la tête de Tuncay, lequel offre une fin de partie insoutenable pour les nerfs.
Turquie: Volkan; Hamit Altintop, Tolga Seyhan, Alpay, Ergün; Selçuk Sahin; Serhat Akin (70e Metin), Emre (82e Bastürk), Tuncay; Sükür, Necati (81e Tekke). Entraîneur: Terim.
Suisse: Zuberbühler; P. Degen (46e Behrami), Müller, Senderos, Spycher; Barnetta, Cabanas, Vogel, Wicky; Gygax (33e Streller puis 87e Huggel); Frei. Entraîneur: Kuhn.
Notes: La Suisse sans Smiljanic, H. et M. Yakin (blessés), ni Magnin (suspendu). Lonfat et Jakupovic dans les tribunes. Touché à l'épaule droite, Gygax doit sortir sur blessure. Dès l'entrée de Streller, Frei recule d'un cran.
Avertissements: Degen (10e, jeu dur), Selçuk Sahin (12e, faute sur Barnetta), Emre (21e, provocations), Tolga Seyhan (44e, faute sur Wicky), Streller (51e, faute sur Serhat), Zuberbühler (63e, perte de temps), Ergün (67e, faute sur Behrami), Behrami (68e, faute sur Necati), Metin (73e, faute sur Barnetta).
Coups de coin: 3-4 (2-3).